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Les sociétés coopératives d'intérêt collectif sont-elles des "acteurs de territoires innovants et inclusifs" ? Une rencontre entre des dirigeants de Scic et des chercheurs a permis de valoriser les atouts de ce statut qui permet à différents types de partenaires, dont éventuellement des collectivités, de s'associer pour mener une entreprise commune.

L'Institut de recherche en gestion des Universités Paris-Est Créteil et Marne-la-Vallée et la Confédération générale des Scop (CG Scop) organisaient le 11 mai 2017 un événement dédié aux sociétés coopératives d'intérêt collectif (Scic). L'occasion de faire un point d'étape sur un projet de recherche intitulé "Pilotage alternatif de la performance dans les Scic" et de donner la parole à des représentants de ces coopératives qui réunissent des sociétaires de différentes natures.
 
Pour rappel, une Scic associe des producteurs (salariés, agriculteurs, artisans…), des bénéficiaires (clients, fournisseurs, bénévoles…) et au moins un autre type de parties prenantes (collectivités locales, partenaires privés, …). Selon la CG Scop, 627 Scic étaient en activité au 31 décembre 2016. Un tiers d'entre elles avaient une ou plusieurs collectivités à leur capital, principalement des communes et des intercommunalités et le plus souvent dans les secteurs de l'environnement et des énergies renouvelables.
 
  • Le dialogue dans la reconnaissance du rôle de chacun
 
Ainsi, dans la Meuse, la Scic Savécom spécialisée dans la rénovation thermique de l'habitat implique la commune de Commercy, la communauté de communes de Commercy - Void – Vaucouleurs, le conseil départemental de la Meuse et la région Lorraine. Pour Jacques Faivre, directeur de la structure, la Scic a constitué un "outil adapté" pour avancer sur le terrain de la lutte contre la précarité énergétique, en permettant le dialogue et la "reconnaissance respective des rôles de chacun" – le "technique" pour les experts, la "moralité" pour les élus.
 
Dans un autre domaine, celui de l'accueil et de l'accompagnement des personnes âgées en perte d'autonomie, le statut de la Scic a également été plébiscité à Versailles (Yvelines). Initiée par la ville et le centre communal d'action sociale (CCAS), la Scic Solidarité Versailles Grand Age travaille depuis 2012 à la mise en place d'une plateforme gérontologique associant un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), un accueil de jour et un service de soins infirmiers à domicile dont une équipe spécialisée Alzheimer.
 
Gestionnaire de l'Ehpad initial, le CCAS est au capital de la Scic. Les autres associés sont la foncière "Entreprendre pour humaniser la dépendance" (du mouvement Habitat et Humanisme), qui a investi 4 millions d'euros, des financeurs publics (le conseil départemental des Yvelines, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et l'Agence régionale de santé), des salariés, des résidents et leur famille et d'autres partenaires médico-sociaux et sanitaires.
 
  • Dialogue social et responsabilisation des salariés
 
Dans cette nouvelle configuration, la collectivité s'est "décentrée", est devenue "animateur du territoire" tout en "posant des garde-fous" tels qu'un "prix de journée maîtrisé", de l'avis de Corinne Bebin, maire adjointe de la ville de Versailles et présidente de la Scic. Outil de "dialogue social", la Scic a permis aussi au personnel soignant et non-soignant de "faire un pas de côté" pour aller vers un accompagnement plus respectueux du choix des personnes âgées et plus adapté à l'évolution de leurs besoins, ajoute l'élue.
 
La Scic serait donc un levier de responsabilisation des différentes parties prenantes d'un projet. C'est ce qu'a perçu Hervé Defalvard, responsable de la Chaire ESS de l'Université Paris-Est Marne-la-Vallée, en échangeant avec les salariés et associés de l'entreprise à but d'emploi Actypoles à Thiers (Puy-de-Dôme), la seule entreprise de l'expérimentation "Territoires zéro chômeur de longue durée" à avoir opté pour le statut de Scic. Officiellement embauchés le 1er mai dernier, les trente premiers salariés "ont co-écrit les statuts, travaillent sur le projet depuis un an et sont préoccupés par le sort de l'entreprise aussi parce que c'est leur entreprise", explique-t-il.
 
  • Une formation en ligne dès septembre prochain pour les collectivités
 
Le statut de Scic semble donc particulièrement intéressant lorsqu'un intérêt collectif entre plusieurs parties prenantes est bien identifié et lorsque la complexité du projet requiert une importante dose de dialogue entre les parties prenantes. Pour Christophe Houdebine, directeur de la Scic Urbancoop, dont le but est de permettre à des populations modestes d'accéder à la propriété dans des territoires frappés par la spéculation immobilière, les avantages de la Scic l'emportent sur les difficultés. De son aveu toutefois : "C'est une provocation de se mettre en Scic quand on a besoin de lever des fonds." La rémunération peu attractive de l'investissement n'attirerait pas les fonds dédiés à l'ESS. Quant à la participation des collectivités, elle serait toujours freinée par la crainte des soupçons de conflits d'intérêt.
 
A la demande du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), la CG Scop proposera à partir de septembre prochain une formation en ligne "Scic et collectivités". D'ici là, la CG Scop publiera le détail de ces derniers chiffres sur la montée en charge des Scic. Parallèlement, l'Institut de recherche en gestion diffusera prochainement les résultats de ces travaux sur les perspectives ouvertes par les Scic en matière de gestion alternative des entreprises.